“Arles Queen” Gaël Serre

Exposition du mardi 7 au lundi 20 mai 2024
Vernissage le mardi 7 à 17h

Un coup de mistral décoiffant, inattendu, autour d'une icône… Indétrônable, immuable dans ses gestes, l'apparat d'un costume, d'une allure boostée par le port et la grâce d'une Reine. Une madone qui tous les trois ans, sans regarder derrière, laisse sa place à une autre… Éternelle et éphémère, elle porte un cycle respectueux. Et avec elle l'exemple d'une cité antique que le monde nous envie.
Arles, d'air, d'ombre et de lumière. Arles, de repli et de conquête. Arles, de traditions ferventes, porteuse de projets, quand bien au-delà de ses atours, elle convoque une modernité éclatante, sincère et authentique.

Autour de cet hommage inédit, il y a d'abord une rencontre : celle de l'artiste-plasticien Gaël Serre, peintre coloriste et dessinateur de tous les instants, avec le photographe Hervé Hôte ; l'œil-caméléon, affûté, ajusté, posé sur cette capitale de l'image qui est son quotidien. Jamais là où on l'attend, il sait révéler comme personne. «C'est dans le quartier de l'Hauture, en poussant la porte de sa Chapelle romane de la Madeleine, acquise et rénovée au service de l'art contemporain (à travers le calendrier de la galerie High Art qui l'occupe...) que je suis tombé sous le charme de son potentiel patrimonial et de l'engagement du personnage. « La réflexion était lancée, j'avais mille idées en tête à lui proposer ! Mais je voulais d'abord qu'Hervé pousse la curiosité jusqu'à Sète où je vis et travaille, découvre l'horizon à fleur d'eau du cimetière marin, m'accompagne au Musée Paul Valéry, vibre à ciel ouvert pour sentir le pouls de la ville. Et ramener cette Méditerranée époustouflante de beauté au cœur battant d'Arles, pour faire palpiter les murs pluridisciplinaires de son autre lieu, la Maison Close, très ouverte à la création. » Audacieux et combien jubilatoire ! La 2e édition locale du Festival du Dessin (20 avril – 19 mai) aura donc servi de prétexte à l'évènement. Dans la lumière zénithale de la rue Robert Doisneau, le peintre impatient s'est donc attelé fougueusement à la tâche, laissant foisonner son imaginaire, débridé autour de ces arlésiennes rêvées, fantasmées: « je les aies beaucoup peintes, capturées dans l'instant. Elles sont une inspiration permanente: j'aime leurs costumes, leurs couleurs, l'harmonie de leur parade, leur ferveur... J'aime aussi la part d'élégance apportée par les hommes à ces usages, leur noble fierté. »

Tout aussi providentielle, l'autre rencontre de l'histoire avec Camille Hoteman, XXIV reine à porter la symbolique coiffe a été déterminante, dès la genèse du projet validé sans restriction par l'association Festivarles, garante de la maintenance et des traditions locales. En quelques séances et approches depuis la boutique-atelier familiale de la Couronne, l'âme de la jeune femme, son élégance, sa modernité ont déclenché sur le vif, une série de dessins au graphite et pastel fusant comme des croquis de mode ; des moments de grâce inespérés, portés par cette silhouette toute en formes et en courbes, évoluant au gré de son habillage avec ses cheveux d'abord souples et défaits, puis impeccablement apprêtés dans sa coiffure naissante révélant comme un cadeau offert dans la confiance réciproque, une sensualité magnifique. Allant même jusqu'à être effleurée, comme une caresse, par le pinceau. Au coloriste inné puisant dans la palette de Dufy, Matisse, Chagall, les premières esquisses tracées à la pointe graphite, au pastel sec, puis cernées à l'encre de Chine et imprégnées aux aquarelles vives, éclatantes... A l'artiste toujours en cheminement intérieur, l'idée aussi d'approcher un médium inédit, les arènes vues du ciel par Hervé Hôte le temps des Goyesques, pour se les approprier au rythme de découpages transgressifs, percutants, magnifiques ! Peindre, photographier, regarder encore et encore. Démultiplier décors et silhouettes en dessins et photos, à échelle humaine. De l'audace affirmée donc entre patrimoine et contemporanéité absolue.

Usages revisités, osés, déployés jusqu'à déshabiller la mythique arlésienne pour la mettre à nu, dans son enveloppe d'argile. Modelée dans la « confection » de pièces en grès avec la complicité de la céramiste sétoise Anaïs Dezarnaud œuvrant au sein du studio Broca, cette collection inédite va faire chavirer les cœurs. Et c'est sûr, monter les enchères au gré d'autres merveilles, bronzes, assiettes en porcelaine fine et une série unique, numérotée, de pièces en cire aux couleurs poudrées imaginées dans les coulisses de la Ciergerie des Prémontrés, à Tarascon. Avec en point d'orgue, la performance filmée au cœur des Arènes d'une mise en lumière très attendue : imaginez quelques secondes la scène, le costume ajusté, immaculé de la Reine ; drapé comme une toile vierge, soudain rythmé de couleurs. La fièvre du geste... Hommage à l'histoire, à la culture d'Arles, à la corrida, aux arlequins de Picasso et de Lucien Clergue. Hommage à la liesse et au recueillement, à l'interprétation libre, spontanée, que chacun pourra tirer de cette invitation de couleurs vibrantes, rayonnantes, d'une énergie folle.

Arles Queen est prête, bien en place. Le Solo Show peut commencer…

Caroline Guiol